« Cancer colorectal : dépistage, les jeunes aussi ? »
Le cancer colorectal touche de plus en plus de personnes de moins de 50 ans. Souvent, le délai pour poser le diagnostic est trop long, car les médecins ne pensent pas à cette maladie chez les plus jeunes, comme en témoigne Myriam, patiente faisant partie de Mon Réseau Cancer Colorectal, lors d’une webconférence organisée par Patients en réseau à l’occasion de Mars bleu. Pour le Pr Thierry Ponchon, gastro-entérologue au CHU de Lyon, il est urgent de trouver des solutions pour améliorer le dépistage en France.
« Il a fallu 3 ans pour que mon cancer colorectal soit enfin diagnostiqué, raconte Myriam. J’avais beau alerter sur mes maux de ventre et consulter des médecins, leur réponse était : ‘vous avez moins de 50 ans, votre prise de sang est bonne, tout comme votre échographie, donc cela doit être les règles ou le stress’. Lorsque j’ai eu accès à un gastro-entérologue, il m’a dit ‘si vous insistez vraiment, on va faire une coloscopie’ ». Cette errance diagnostique, de nombreux patients la vivent, car le cancer colorectal a une réputation qui lui colle à la peau : celle de toucher les personnes âgées. Or, il atteint aussi les moins de 50 ans, et son incidence est en augmentation chez les adultes jeunes. « En France, le nombre de cas de cancer colorectal a augmenté entre 2004 et 2016 de 8% par an chez les personnes de 20-29 ans et de 5% chez celles de 30-39 ans, indique le Pr Thierry Ponchon. En 2030, on estime que 11% des cancers coliques et 23% des cancers du rectum concerneront les moins de 50 ans ».
Les raisons de cette augmentation sont multiples : la mauvaise alimentation, la sédentarité, l’obésité, le tabac ou encore l’alcool. « Il faut lutter contre la ‘malbouffe’ chez les jeunes, qui est une cause majeure de cette augmentation », insiste le Pr Ponchon.
« Il est important de sensibiliser les professionnels de santé à ce sujet, pour qu’ils s’alertent face à des symptômes évocateurs », souligne Laure Guéroult-Accolas, fondatrice et directrice de Patients en réseau.
Abaisser l’âge du dépistage ?
Ces chiffres interpellent à l’heure où le dépistage organisé du cancer colorectal s’adresse dans notre pays aux personnes de 50 à 74 ans. Selon le Pr Ponchon, « Il faudrait redéfinir les bornes d’âge, et surtout améliorer la participation au dépistage ». La France fait en effet figure de mauvaise élève, avec un taux de participation de 35,5%, contre 46% en Espagne et plus de 54% en Italie. « L’insuffisance de financement et le manque de pilotage de qualité expliquent en partie la faillite du dépistage organisé en France, observe le gastro-entérologue. Son intérêt financier n’est pas évalué alors qu’il permet d’éviter les dépenses liées au traitement du cancer ».
Les taux de participation pourraient être améliorés en multipliant les voies de distribution des kits de dépistage. Aujourd’hui, ils peuvent être achetés en pharmacie, commandés en ligne, ou être livrés à domicile après avoir répondu au courrier de l’Assurance Maladie. « Les envois directs aux personnes concernées pourraient être intéressants, comme c’est le cas aux Pays-Bas ou en Angleterre, note le Pr Ponchon. En France, on s’interroge encore sur cette solution ».
Briser les tabous et en parler en famille
Myriam a découvert, une fois le diagnostic posé, que sa grand-mère était morte d’un cancer colorectal et que sa mère avait subi une stomie. « Personne ne me l’avait dit lorsque je me plaignais de douleurs au ventre, or ces informations auraient pu aiguiller les médecins », regrette-t-elle. « Il ne faut pas hésiter à en parler en famille, afin de connaître ses facteurs de risque », insiste Laure Guéroult-Accolas. On estime que 3% des tumeurs du côlon et du rectum seraient lié à une prédisposition génétique.
Dans la majorité des cas cependant, le cancer colorectal est dû à une tumeur bégnine appelée polype ou adénome. Seuls les plus volumineux d’entre eux évoluent lentement vers un cancer, d’où l’importance de les dépister, afin de les retirer.
Ces polypes peuvent entraîner des symptômes qui doivent alerter, comme la présence de sang dans les selles, une modification du transit pendant au moins un mois, une alternance de diarrhées et de constipation, l’impression de mal se vider après être allé à la selle, ou encore des douleurs abdominales.
Mais n’attendez pas d’avoir des symptômes pour réaliser le dépistage, car un cancer colorectal détecté tôt se guérit dans 9 cas sur 10 !
Article rédigé par Sandrine Chauvard suite à la webconférence du 27 mars 2024
Retrouvez notre webconférence du 27 mars 2024 réalisée à l'occasion de "Mars Bleu", mois consacré à la sensibilisation aux cancers colorectaux et au dépistage organisé. Nous avons voulu faire le point sur ces questions :
avec nos invités :
Le programme LinK Colorectal est proposé par notre association Patients en réseau et Dis-moi Santé
Ce programme a été rendu possible par le soutien institutionnel de Bristol Myers Squibb, Norgine, Pierre Fabre, Merck et Servier
Auteur : Sandrine Chauvard
Source : Patients en réseau et Dis-moi Santé